Août 1897



N° 85


Séance du 3 Août 1897



Par suite d'une erreur dans la rédaction du procès-verbal numéro 82 des 24 25 et 26 Juillet 1897, les Amiraux décident que ce procès-verbal sera annulé et réimprimé sous le numéro 82 bis.?????========???????

L'Amiral anglais informe ses collègues qu'à la suite de la dépêche identique du 26 Juillet, son Gouvernement a envoyé 450 hommes de troupes qu'il a débarqués le 3 Août à Candie pour renforcer la garnison de cette ville.

L'Amiral français annonce aux Amiraux que Djevad Pacha a fait une visite au Commandant Supérieur des troupes françaises relativement aux incidents relatés dans le procès-verbal de la séance du 31 Juillet N° 84, et que, se rangeant à l'avis du Lieutenant-Colonel Famin, il estime qu'il y a lieu de considérer ces questions terminées.

Les Amiraux décident en conséquence qu’il ne sera donné aucune suite à cette affaire.

Une nouvelle demande est parvenue aux Amiraux, d'élargir le cordon qui limite les Musulmans autour de Candie. Cette question étant exclusivement militaire, les Amiraux ne verraient aucun inconvénient à l'étudier avec le nouveau Commandant des troupes turques, mais ils pensent toujours qu’elle devrait être traitée à l'amiable avec les insurgés. L'un des Amiraux se mettra en rapport avec Djevad Pacha.

Le Maréchal pourra peut-être s'engager à désarmer les bachi-bouzouks, et il est probable, que, devant une semblable preuve de bonne volonté, les insurgés feraient à leur tour quelques concessions.

Les lettres des insurgés aux Amiraux sont quelquefois marquées d’un sceau aux armes de la Grèce ; il est décidé qu'à l’avenir, il ne sera pas répondu à ces lettres non plus qu'aux gens qui se présentent sous le couvert du pavillon grec. Jusqu'à l'établissement de l'autonomie, les Amiraux ne peuvent reconnaître en Crète que le pavillon et les armes de la Turquie.

Le Gouverneur Ismaïl ayant interdit l'envoi de certaines dépêches privées qui lui ont paru de nature à provoquer de l'irritation en Turquie, les Amiraux le feront informer qu'il n'a le droit de censure que pour les dépêches envoyées en Grèce ou en Turquie, mais qu’il ne doit s'opposer à la transmission d'aucun télégramme privé destiné aux autres pays d'Europe sans le consentement des Amiraux.

À bord du « Maria-Theresia », à La Canée, le 3 Août 1897

Le Contre-Amiral anglais signé : R. Harris
Le Contre-Amiral français signé : Ed. Pottier
Le Contre-Amiral austro-hongrois signé : Hinke
Le Vice-Amiral italien signé : N. Canevaro



N° 86


Séance du 4 Août 1897



Les Amiraux, ayant été informés du départ, des Dardanelles, d'une Division cuirassée turque, pour la Crète, ont décidé de notifier au Gouverneur Ismaïl-Bey qu'ils s'opposeront par la force, au séjour de la Division ottomane, dans les eaux de la Crète. Ils l’inviteront en même temps à faire connaître cette décision à son Gouvernement.

Comme conséquence, ils prennent les dispositions suivantes :

1° Le « Re Umberto » (italien) et « Sybil » (anglais) seront envoyés à La Sude, pour protéger au besoin les compagnies austro-hongroise et italienne qui se trouvent mêlées à des turcs au fort d’Izzedin et de l’îlot et y sont en grande minorité.

Sybil

Le Sybil


2° Les Commandants Supérieurs des navires de la flotte internationale, mouillés devant les ports de la Crète devront envoyer un officier à bord du Commandant de la division turque pour lui notifier la décision des Amiraux.

Ils le feront informer même par écrit, s’il le demande, qu'il doit se rendre au mouillage sur un autre point de l'Empire turc, et ne pas rester à la mer dans le voisinage de la Crète, et que faute de se rendre à cette invitation, l'Escadre turque serait expulsée par la force.

Les Amiraux seront tenus au courant de l'arrivée de l'Escadre turque et de tous ses mouvements par le Commandant du navire de la flotte internationale qui aura eu à notifier leur décision.

3° Les Commandants des troupes internationales, à terre, seront informés, par leurs Amiraux, de se tenir sur leurs gardes, toujours prêts à résister à une attaque, en réunissant leurs troupes sur un point qui puisse être défendu du côté de la mer.

À bord du « Sicilia », à La Canée, le 4 Août 1897

Le Contre-Amiral de la Grande-Bretagne signé : R. Harris
Le Contre-Amiral russe signé : P. Andreeff
Le Contre-Amiral français signé : Ed. Pottier
Le Contre-Amiral austro-hongrois signé : Hinke
Le Vice-Amiral italien signé : N. Canevaro



N° 87


Séance du 6 Août 1897



Les Amiraux confirment au procès-verbal, la dépêche identique suivante, qu'ils ont convenu d’envoyer la veille à leurs Gouvernements :

Le Gouverneur Ismaïl d'une part, et les délégués chrétiens à l’Assemblée crétoise d'autre part, nous exposent que la situation de l'île devient intolérable et nous demandent d'insister encore une fois avec la plus grande énergie pour que nos Gouvernements prennent une décision à l'égard du sort réservé à île.

Dans les villes, les Musulmans sont plongés dans la misère et uniquement nourris par le Gouvernement qui n’assure pas pouvoir continuer longtemps à le faire. Ils sont de plus très irrités de l’incertitude dans laquelle on les laisse au sujet du futur Gouvernement.

Il est à craindre, si cette situation se prolonge, de voir diminuer les bonnes dispositions actuelles des Chrétiens et augmenter les mauvaises des Musulmans.

L'Amiral Canevaro informe ses collègues que le « Vesuvio » a ramené le matin même, à La Canée, un brick-goélette qu'il a rencontré dans le Sud de l’île, avec le pavillon grec, et sur lequel se trouvait : le Capitaine Korakas, deux officiers de l'armée grecque, une trentaine de volontaires armés, deux canons et des munitions.

Ce brick-goélette, nommé « Evangelistria », et dont les papiers n'étaient pas en règle, avait embarqué ce personnel et ce matériel à Kalo Limiones et se rendait en Grèce.

Les Amiraux décident que les canons, armes et munitions, seront confisqués et confiés à la garde du Commandant militaire international à La Canée ; quant au personnel, il sera laissé en liberté et on lui facilitera même le moyen de rentrer en Grèce. Le brick-goélette pourra rentrer en Grèce librement.

Les Amiraux ayant reçu du Gouverneur Ismaïl et du Commandant militaire turc Djevad Pacha, l’assurance, que la Division turque partie des Dardanelles ne viendrait pas en Crète, jugent inutile de maintenir à La Sude les navires qu'ils avaient envoyés à la suite de la séance du 4 Août et décident leur rappel.

À bord de « l’Amiral Charner », à La Canée, le 6 Août 1897

Le Contre-Amiral de la Grande-Bretagne signé : R. Harris
Le Contre-Amiral russe signé : P. Andreeff
Le Contre-Amiral français signé : Ed. Pottier
Le Contre-Amiral austro-hongrois signé : Hinke
Le Vice-Amiral italien signé : N. Canevaro



N° 88


Séance du 7 Août 1897



Le capitaine Korakas, ayant communiqué aux Amiraux une correspondance échangée entre lui et le Colonel Chermside, s'appuie sur cette correspondance pour dire qu'il n'est pas parti de Crète en cachette, et demande à être laissé en possession de ses armes et canons.

Il affirme que le Colonel Chermside, ayant commencé à désarmer les bachi-bouzouks, il a jugé que sa présence n’était plus nécessaire en Crète et que son départ n'est que l'exécution d'un désir exprimé par le Colonel Chermside.

Cette explication serait excellente, si le fait même de s'embarquer sur un mauvais navire, coulant bas d’eau et sans prévenir personne, ne venait mettre le doute dans l'esprit des Amiraux.

Quoi qu'il en soit, les Amiraux feront preuve de bienveillance, le Capitaine Korakas et les officiers qui l'accompagnent seront reconduits au Pirée avec leurs armes, par le « Vesuvio », à la condition de s’engager,
par écrit, à ne pas rapporter en Crète les armes qu’on leur permet d'emporter.

À bord du « Alexandre II », à La Canée, le 7 Août 1897

Le Contre-Amiral de la Grande-Bretagne signé : R. Harris
Le Contre-Amiral russe signé : P. Andreeff
Le Contre-Amiral français signé : Ed. Pottier
Le Contre-Amiral austro-hongrois signé : Hinke
Le Vice-Amiral italien signé : N. Canevaro



N° 89


Séance du 12 Août 1897



Les Amiraux décident l'inscription au procès-verbal de la lettre suivante, qu’ils ont rédigée en commun, et qui a été adressée en leur nom par le Vice-Amiral Canevaro le 10 Août, au Commandant Djevad Pacha, pour répondre à celle que le Maréchal leur a envoyée au sujet de l'élargissement du cordon militaire de Candie :

Monsieur le Maréchal,

En réponse à votre lettre du 8 Août 1897 (N° 49), j'ai l'honneur de vous informer que les Amiraux s'intéressent depuis longtemps à la situation des habitants de Candie, et que, tout dernièrement encore, ils ont étudié les moyens d'élargir le cordon militaire autour de la ville (séance du 3 Août 1897).

Il leur paraîtrait possible d'arriver à ce résultat, mais surtout avec le concours promis par Votre Altesse.

Il ne leur semble pas douteux que, grâce à votre haute influence, les irréguliers turcs (bachi-bouzouks) puissent être vite désarmés et, ce résultat acquis, on obtiendra facilement des insurgés, qui ne craignent que les bachi-bouzouks, de reculer vers l'intérieur.

Si des villages chrétiens doivent se trouver en dedans du nouveau cordon militaire, les Amiraux promettront aux insurgés de les protéger avec une petite garnison de leurs propres troupes. Mais il est nécessaire pour cela que les bachi-bouzouks soient d'abord désarmés et que les troupes internationales ne se trouvent pas entre des irréguliers des deux partis.

Si Votre Altesse avait une autre solution à indiquer aux Amiraux, ils l'étudieraient volontiers, tant ils désirent arriver à un résultat.

La justice régulière turque n’existant plus en Crète depuis de longs mois, les Amiraux ont établi une sorte de justice sommaire, rendue en leur nom, par le Commandant militaire à La Canée, et qui présente toutes les garanties désirables d’impartialité. Ils ont été consultés sur la question de savoir si, comme cela avait lieu devant la justice turque, les Consuls auraient à intervenir, dans le cas où un de leurs nationaux serait intéressé dans une affaire à juger.

Les Amiraux sont d'avis que les capitulations ne sont pas applicables à cette justice sommaire, dont ils représentent eux même l'intégrité ; mais dans le cas où l’un des Consuls se croirait fondé à élever une réclamation contre un arrêt rendu, sa réclamation serait examinée par les Amiraux eux-mêmes, avant que l’arrêt ne reçoive son exécution.

À bord du « Sicilia », à La Canée, le 12 Août 1897

Le Commandant Supérieur de la Grande-Bretagne signé : G.M. Russell
Le Contre-Amiral russe signé : P. Andreeff
Le Contre-Amiral français signé : Ed. Pottier
Le Contre-Amiral austro-hongrois signé : Hinke
Le Vice-Amiral italien signé : N. Canevaro



N° 90


Séance du 14 Août 1897



Deux Musulmans de La Canée, ayant été arrêtés par une patrouille de Carabiniers italiens, se sont rendus coupables de rébellion.

Il est indispensable que les Carabiniers, qui assurent avec les Monténégrins la police internationale, la seule efficace à La Canée, conservent tout leur prestige, et pour cela, que la faute commise ne reste pas impunie.

Les Amiraux décident que dans les cas analogues, et à défaut d'autre juridiction, les coupables seront jugés par les soins du Commandant militaire à La Canée et par une Commission composée d'un officier de chaque nation et même d'un officier turc, si le Commandant militaire ottoman en exprime le désir.

De plus, comme on ne saurait admettre deux polices différentes, l'Amiral Canevaro écrira au nom de ses collègues au Gouverneur Général Ismaïl Bey, pour le prier de mettre la Gendarmerie ottomane sous la dépendance du Capitaine des Carabiniers italiens et d'assurer, en première ligne, la solde de ces gendarmes, sur les produits de la douane.

Dans ces conditions, on pourrait compter sur leur collaboration, et tout au moins sur une unité de direction.

À bord du « Sicilia », à La Canée, le 14 Août 1897

Le Commandant Supérieur de la Grande-Bretagne signé : G.M. Russell
Le Contre-Amiral russe signé : P. Andreeff
Le Contre-Amiral français signé : Ed. Pottier
Le Contre-Amiral austro-hongrois signé : Hinke
Le Vice-Amiral italien signé : N. Canevaro



N° 91


Séance du 20 Août 1897



Les Amiraux prennent connaissance de deux lettres qui ont été adressées par le Gouverneur Général Ismaïl au Commandant militaire international à La Canée, à propos de la Commission militaire de police internationale ; et en même temps d'un rapport du Commandant Amoretti, faisant connaître la composition de cette Commission, qu’il a nommée à la suite de la séance du 14 Août 1897 et qui comprend :

Le Lieutenant-Colonel français Vanderbrock
Le Lieutenant de Vaisseau russe Helstromm
Le Lieutenant de Vaisseau allemand Koch
Le Lieutenant italien Conossi
Le Lieutenant anglais Gaisford
Le Sous-Lieutenant austro-hongrois Rappel

Le Gouverneur Général, dans ses deux lettres, proteste contre la nomination de cette Commission.

Il lui sera répondu, au nom des Amiraux, par leur président, qu'aucune considération ne les fera revenir sur cette question bien étudiée et que, d'ailleurs, la Commission ne doit fonctionner que contre les individus qui attenteraient au prestige des troupes internationales, ou qui porteraient le trouble dans la ville de La Canée.

Cette Commission ne fonctionnera qu’à La Canée, où toute la police repose sur les troupes internationales, mais si c'était nécessaire, les Amiraux se réservent d’en créer de semblables à Rethymno et à Candie.

La réponse faite à Ismaïl sera annexée au procès-verbal.

Les prisons de Candie renferment actuellement 40 individus, arrêtés dans le courant des mois de Juillet et d’Août, pour divers crimes ou délits. Sur la demande de l'Amiral anglais, les Amiraux décident, par analogie avec ce qui a été fait déjà une fois pour les prisonniers de La Canée (séance du 12 Avril) que ces malfaiteurs devront être renvoyés dans une prison quelconque de l'Empire turc, hors de Crète.

Il sera écrit dans ce sens au Gouverneur Général qui, déjà, à l'occasion des prisonniers de La Canée, a déclaré qu'il se soumettrait volontiers à une invitation faite dans ce sens par les Amiraux.

À bord du « Sicilia », à La Sude, le 20 Août 1897

Le Contre-Amiral de la Grande-Bretagne signé : R. Harris
Le Contre-Amiral russe signé : P. Andreeff
Le Contre-Amiral français signé : Ed. Pottier
Le Contre-Amiral austro-hongrois signé : Hinke
Le Vice-Amiral italien signé : N. Canevaro



N° 92


Séance du 23 Août 1897



Les habitants du village de Kokino voisin du phare de Drepano ont prétendu imposer à la direction des phares ottomans, des gardiens de leur choix. Il était à craindre que le service du phare pût souffrir de la querelle entre les gardiens titulaires et ceux qui s'étaient, de force, substitués à eux.

Dans ces circonstances, les Amiraux ont décidé d'assurer provisoirement ce service avec un détachement de 10 marins et un sous-officier, fourni tour à tour, et par période de 10 jours par une des nations représentées en Crète.

Le détachement italien a pris le 20, possession du phare, malgré la proposition du Gouverneur Général d'assurer le service par ses moyens ; il était, en effet, trop évident que la présence de gardiens ottomans eût été encore plus dangereuse que celle des gardiens titulaires, lesquels sont, au moins, les coreligionnaires des gens de Kokino.

À bord du « Sicilia », à La Sude, le 23 Août 1897

Le Contre-Amiral de la Grande-Bretagne signé : R. Harris
Le Contre-Amiral russe signé : P. Andreeff
Le Contre-Amiral français signé : Ed. Pottier
Le Contre-Amiral austro-hongrois signé : Hinke
Le Vice-Amiral italien signé : N. Canevaro



N° 93


Séances du 25 et 30 Août 1897



L'Amiral Canevaro, dans les précédentes séances, a donné connaissance à ses collègues de trois lettres qui lui ont été adressées par le Commandant militaire ottoman Djevad Pacha :

1° Le 8 Août, le Maréchal demandait avec insistance l'élargissement du cordon militaire autour de Candie ;

2° Le 13 Août, il faisait des objections au désarmement des bachi-bouzouks proposé par les Amiraux comme le meilleur et sûr moyen d'obtenir des insurgés, à l’amiable, l’élargissement du cordon ;

3° Le 14 Août, il déclarait qu'il n'y avait plus à s'occuper de cette question insoluble.

Or, en même temps que cette dernière lettre, les Amiraux recevaient communication d'une note du Colonel Chermside, Commandant Supérieur à Candie, et cet officier supérieur déclarait, après avoir lu la lettre du 8 Août du Maréchal, qu’il semblait très possible d'arriver au résultat désiré.

Les Amiraux décidèrent, en conséquence, qu’il y avait lieu de ne pas abandonner cette question et chargèrent l'Amiral Hinke d’en poursuivre l'étude.

Aujourd'hui, 25 Août, l'Amiral Canevaro communique deux dépêches, l'une de son Consul à Candie, l'autre du Commandant des troupes Italiennes, et l'Amiral Harris une note du Colonel Chermside.

Il résulte de ces trois communications que la population musulmane de Candie a fait une démonstration hostile au Gouverneur turc de Candie, et réclamé à la fois une distribution plus équitable des vivres accordés comme secours par le Gouverneur ottoman et l'élargissement du cordon militaire.

C’est une raison pour les Amiraux de persister dans les démarches qu'ils ont chargé l'Amiral austro-hongrois de faire avec le Colonel Chermside.

Les Amiraux ont reçu du consul Général de France à La Canée, une demande de rectification à leur procès-verbal du 28 Juin relatif au paiement de la dîme.

La dîme n'est, en Crète, qu'un impôt d’exportation auquel sont soumis les produits du sol crétois consommés à l'extérieur, tandis que la douane frappe les marchandises importées.

Les Amiraux n'ont eu pour but que d'exonérer leurs troupes du paiement de la dîme, et il se trouve justement que personne en Crète ne paie ce droit pour les marchandises récoltées et consommées dans l’île, mais une phrase mal rédigée du procès-verbal du 28 Juin peut faire croire que les Amiraux ont voulu exempter les marchandises importées du droit de douane. Cette fausse interprétation pouvant susciter des difficultés, les Amiraux abrogent la partie du procès-verbal du 28 Juin relative à la dîme et la remplacent par la rédaction suivante inspirée par les Consuls après entente avec le Gouvernement ottoman et avis du Commandant Amoretti :

Le droit de la dîme n'étend pas percevable sur les produits consommés dans l'intérieur de l’île, ne peut être perçu sur les produits crétois destinés aux troupes internationales.

D'autre part, sont exemptés des droits d'importation de 8 % et de la surtaxe douanière de 3 % :

1° Tous les objets ou marchandises arrivant en Crète à l'adresse des commandements, officiers, soldats ou marins du corps d'occupation ;

2° Tous objets ou marchandises envoyés par les Gouvernements européens pour le service de leurs troupes en Crète ;

Par contre, toute marchandise importée par un négociant, fournisseur d'un ou plusieurs contingents étrangers, même si elle est destinée aux troupes internationales, est soumise au paiement des deux taxes douanières du 8% et du 3 % ad valorem.

À bord du « Alexandre II », à La Sude, le 25 Août 1897


Les Grecs habitants les villes occupées par les troupes internationales ont manifesté aux Amiraux le désir de pouvoir se livrer aux pratiques religieuses de leur culte, sans être troublés par les Musulmans.

Cette demande est parfaitement justifiée et l'Amiral Canevaro a fait savoir au Gouverneur Général que les cérémonies religieuses grecques devaient se faire avec la même liberté que celles des mosquées.

Le Gouverneur a répondu, le 26 Août, que cette liberté a toujours existé et que les troupes ottomanes n'ont jamais eu à réprimer des manifestations hostiles de la part de leurs coreligionnaires.

Il affirme, en tout cas, que, pour l’avenir, cette liberté sera assurée aux Grecs orthodoxes et que les troupes ottomanes feraient respecter au besoin sa promesse d’aujourd’hui.

À bord du « Revenge », à La Sude, le 30 Août 1897

Le Contre-Amiral de la Grande-Bretagne signé : R. Harris
Le Contre-Amiral russe signé : P. Andreeff
Le Contre-Amiral français signé : Ed. Pottier
Le Contre-Amiral austro-hongrois signé : Hinke
Le Vice-Amiral italien signé : N. Canevaro



31 Août 1897


Ordonnance pour la constitution d'une Commission Militaire internationale de police



Nous Amiraux, Commandants en Chef les forces internationales dans l’île de Crète,

Attendu que par suite d'un accord intervenu entre les Grandes Puissances et Sa Majesté Impériale le Sultan, l'île de Crète a été placée sous la protection des Grandes Puissances, jusqu'au jour où il aura été statué définitivement sur son sort ;

Attendu que cette protection a été consacrée par la présence des navires de guerre étrangers et par l'occupation des principales villes du littoral crétois par les contingents de troupes de chacune des Puissances ;

Attendu que par le fait de l'occupation militaire de l’île de Crète, les Puissances ont assumé la responsabilité du rétablissement de l'ordre dans l'île et de son maintien, et que les Amiraux doivent en conséquence prendre toutes les mesures nécessaires pour remplir le mandat qui leur a été confié par leurs Gouvernements ;

Attendu que ce mandat ne saurait être rempli si une sanction pénale ne pouvait atteindre les perturbateurs de la sécurité publique et si l'on ne disposait pas des moyens légaux pour maintenir le prestige des troupes internationales ;

Attendu que depuis les derniers troubles, les Tribunaux crétois ont cessé de fonctionner ;

Attendu qu'il est de toute impossibilité de procéder, dans les circonstances actuelles, à la réorganisation, même provisoire, des Tribunaux fonctionnant régulièrement conformément aux lois en vigueur et à la constitution particulière de l'île de Crète ;

Attendu que les Amiraux doivent, en vertu du mandat qui leur est confié, prendre uniquement en considération les exigences de la situation anormale dans laquelle la Crète se trouve placée, et l'intérêt général des populations du pays ;

Attendu qu'il importe, dans ces conditions, que toute sanction pénale émane exclusivement de l'autorité qui a assumé la responsabilité du maintien de l'ordre dans le pays ;

Attendu qu'en acceptant le dépôt qui a été fait entre leurs mains par Sa Majesté Impériale le Sultan, les Grandes Puissances ont été, par le fait même, subrogés à tous droits découlant de la souveraineté impériale, dont l'exercice est indispensable pour l’accomplissement de leur mandat ;

Attendu que les dispositions prises dans cette ordonnance sont similaires à celles contenues dans les codes militaires des Grandes Puissances ;

Par ces motifs,

Ordonnons

1° Une Commission Militaire de police internationale est créée à La Canée.

Elle est composée comme il suit :

Le Lieutenant-Colonel français Vanderbrock
Le Lieutenant de Vaisseau russe Helstromm
Le Lieutenant de Vaisseau allemand Koch
Le Lieutenant italien Conossi
Le Lieutenant anglais Gaisford
Le Sous-Lieutenant austro-hongrois Rappel

2° La Commission Militaire de police internationale jugera sans appel, sur la base du code militaire italien, tous les faits se référant contre la sécurité publique, ainsi que les offenses de toute nature au préjudice des officiers et soldats internationaux de terre et de mer, et du personnel de la gendarmerie internationale, qui se commettraient tant par les indigènes sujets de Sa Majesté Impériale le Sultan que par les administrés étrangers dans le territoire occupé par les Grandes Puissances ;

3° Les Tribunaux Consulaires continuant à fonctionner régulièrement, tous sujets étrangers inculpés d'un crime, d'un délit ou d'une contravention autre que ceux spécifiés dans l’article 2 de la présente ordonnance seront remis aux Consuls pour qu'il soit procédé contre eux conformément aux prescriptions des capitulations.

La condamnation sera subie là où les Amiraux décideront selon les circonstances.

Article additionnel.

Les Amiraux se réservent, quand ils le jugeront opportun, de créer des Commissions Militaires similaires aussi dans les autres villes de la Crète occupées par les forces internationales, et dans ce cas en appliquant le code militaire de la nation à laquelle appartient le Commandant Supérieur de la localité.

À La Sude, le 31 Août 1897

Le Contre-Amiral de la Grande-Bretagne signé : R. Harris
Le Contre-Amiral russe signé : P. Andreeff
Le Contre-Amiral français signé : Ed. Pottier
Le Contre-Amiral austro-hongrois signé : Hinke
Le Vice-Amiral italien signé : N. Canevaro


Crète - Occupation Internationale