Juin 1897
N° 68
Séance du 5 Juin 1897
Deux caïques forçant le blocus ont été saisis par un navire austro-hongrois.
Les Amiraux décident qu'on confisquera les armes des hommes passagers sur ces caïques : les Crétois auront l'autorisation de débarquer ; quant aux autres, ils seront gardés à bord ; on leur donnera toute facilité pour se procurer une preuve de leur identité, et dès qu'ils la fourniront, les Amiraux prendront une décision à leur égard.
L'Amiral austro-hongrois fait savoir que les soldats turcs de la forteresse de Kissamos sont inquiets de voir les insurgés s'approcher avec leurs armes de la citadelle sous prétexte de travailler à leurs champs. Ordre leur sera donné de déposer dorénavant leurs armes lorsqu'ils arriveront à portée de fusil du fort.
L'Amiral anglais, de retour de Candie, annonce qu'il a réuni les chefs insurgés ; il leur a fait savoir que les Amiraux ne supporteraient pas plus longtemps la privation d'eau dont souffrait la ville et que, à la première menace de leur part, les troupes turques, renforcées au besoin par des troupes internationales, prendraient possession des sources. Les chefs ont promis de remédier à cet état de choses et au moment où l'Amiral anglais quittait Candie, l'eau coulait en ville et un ruisseau desséché jusqu'à ce jour donnait de l’eau en abondance.
Les insurgés ont d'ailleurs paru plus conciliants et tout disposés à accepter l’autonomie, en y mettant toujours pour première condition le retrait des troupes turques.
À bord du « Sicilia », à La Sude, le 5 Juin 1897
Le Contre-Amiral russe signé : P. Andreeff
Le Contre-Amiral anglais signé : R. Harris
Le Contre-Amiral français signé : Ed. Pottier
Le Contre-Amiral austro-hongrois signé : Hinke
Le Vice-Amiral italien signé : N. Canevaro
N° 69
Séance du 8 Juin 1897
Les chefs insurgés d'Akrotiri sont venus hier, voir l'Amiral italien. Celui-ci leur a conseillé vivement d’écrire à leurs amis en Grèce pour les engager à ne pas venir en Crète, car les Amiraux sont décidés à traiter très sévèrement tous ceux qui seraient désormais reconnus pour des agitateurs.
Les insurgés d’Akrotiri ont demandé l'autorisation de faire venir un bâtiment chargé de vivres, car il est probable que les élus des autres districts vont venir les rejoindre et ils désirent être approvisionnés plus largement. Les Amiraux leur accordent cette faveur, mais le bâtiment, après avoir été visité pour s'assurer qu'il n'apporte ni armes ni munitions, devra être déchargé dans la baie de La Sude, sur la terre même d'Akrotiri.
L'Amiral anglais fait savoir qu'un de ses bâtiments a saisi à Platanias des barques naviguant sous le pavillon grec. Comme pour les caïques saisis par le navire austro-hongrois, les Amiraux décident qu’une règle uniforme sera prise désormais pour tous les navires saisis.
Les armes des passagers seront confisquées, les Crétois seront débarqués, les autres passagers conservés à bord jusqu'à ce qu’ils aient fourni une preuve de leur identité ; et s'il y a parmi eux des agitateurs, ils seront traités avec une grande sévérité.
Vu la difficulté d'établir des troupes dans le village de Chicolaria, et en raison du calme de ces derniers jours, les Amiraux décident qu’il ne sera pas donné suite à ce projet d’occupation.
Les Amiraux estiment, enfin, que le temps est venu d'étendre un peu leur protection en dehors des villes occupées par eux ; en conséquence, des marches et promenades militaires, ayant d'ailleurs un caractère tout pacifique, seront faites fréquemment en dehors du cordon militaire aux environs de La Canée.
À bord du « Sicilia », à La Sude, le 8 Juin 1897
Le Contre-Amiral russe signé : P. Andreeff
Le Contre-Amiral anglais signé : R. Harris
Le Contre-Amiral français signé : Ed. Pottier
Le Contre-Amiral austro-hongrois signé : Hinke
Le Vice-Amiral italien signé : N. Canevaro
N° 70
Séance du 10 Juin 1897
Les chefs insurgés d'Akrotiri élus par leurs compatriotes, demandent aux Amiraux l'autorisation de se rendre dans les différents districts pour s'entendre avec les élus de ces districts et les ramener au siège de leur Assemblée qui sera soit en Akrotiri, soit dans l’Apokorona.
Ils demandent en outre qu'un petit navire de la flotte internationale les conduise sur les différents points de la côte qu’ils désirent visiter et comme ils ignorent les conditions de sûreté à l’intérieur de l’île, ils seraient reconnaissants aux Amiraux s'ils leur permettaient de faire ce voyage avec leurs armes.
Cette faveur leur est accordée, l'Amiral russe met le « Zaporojetz » à leur disposition et, de plus, les Commandants Supérieurs dans les différents points devront les faire escorter par des troupes européennes, s’ils en témoignent le désir.
Les Amiraux décident ensuite que lorsqu'un navire aura été saisi par effet du blocus, il ne lui sera permis de faire des opérations de marchandises que lorsqu'il aura montré un acte signé des autorités compétentes attestant qu'il a payé les droits de douane.
À bord du « Royal Oak », à La Sude, 10 Juin 1897
Le Contre-Amiral russe signé : P. Andreeff
Le Contre-Amiral anglais signé : R. Harris
Le Contre-Amiral français signé : Ed. Pottier
Le Contre-Amiral austro-hongrois signé : Hinke
Le Vice-Amiral italien signé : N. Canevaro

Le Royal Oak
N° 71
Séance du 16 Juin 1897
Les insurgés des environs de La Canée, ayant demandé aux Amiraux l'assurance qu'ils ne seraient pas inquiétés pendant leurs travaux agricoles, qu’ils désirent reprendre, il a été décidé que des détachements européens protégeraient les travailleurs.
Une demi-compagnie de matelots italiens, renforcée de six marins allemands, a commencé ce service, mais les insurgés sont venus au travail en armes. Les Amiraux estiment que la protection accordée mérite plus de confiance et décident que le détachement austro-hongrois qui doit, à son tour, assurer le même service, ne le fera que si les insurgés se présentent sans leurs armes. Des instructions dans ce sens seront données au Commandant Amoretti.
L'archevêque grec a demandé aux Amiraux en faveur des insurgés des environs d’Izzedin, l'autorisation de venir cultiver leurs champs jusqu’aux approches du blockhouse.
Les Amiraux ont déjà été saisis d'une semblable demande et confirment leur première décision ; ils ne peuvent pas permettre que les insurgés se présentent en dedans des avant-postes turcs qui ont été établis.
L'Amiral anglais, ayant été informé que le Gouverneur Ismaïl se proposait de mettre en liberté dix prisonniers, envoyés de Candie, et actuellement incarcérés à La Canée, a prié le Gouverneur de les détenir jusqu'à ce que les Amiraux aient statué à leur égard. On attend, en effet, un rapport du Colonel Chermside au sujet de ces individus.
Les Amiraux approuvent le télégramme de l'Amiral Harris.
À bord du « Maria-Theresia », La Sude, le 16 Juin 1897
Le Commandant Supérieur italien signé : C. Mirabello
Le Contre-Amiral russe signé : P. Andreeff
Le Contre-Amiral anglais signé : R. Harris
Le Contre-Amiral français signé : Ed. Pottier
Le Contre-Amiral austro-hongrois signé : Hinke

Le Maria-Theresia
N° 72
Séance du 19 Juin 1897
L'Amiral russe a reçu, par l'intermédiaire du Gouverneur Général de la Crète, diverses réclamations du Gouverneur de Rethymno exposant que :
1° Les promenades militaires à l'extérieur des avant-postes seraient la cause d'encouragements au désordre pour les insurgés, et de relations amicales entre ces derniers et les troupes internationales.
2° Par suite de l'occupation de la citadelle de Rethymno par les Russes, les femmes musulmanes qui habitent des maisons délabrées et souvent privées de fenêtres sont exposées au regard des soldats.
3° La population est très resserrée et il y aurait lieu d'élargir la zone occupée par les Musulmans.
Les Amiraux consultés décident que la réponse à faire est la suivante :
Les promenades militaires autour de Rethymno, surveillées par des officiers russes, ne peuvent être la cause de désordres, qui seraient immédiatement réprimés ; si ces promenades font naître des relations amicales entre les troupes internationales et les insurgés, elles remplissent justement le but pacificateur poursuivi par les Amiraux et dans l'intérêt de tous, il y aurait lieu de les multiplier, plutôt que de les supprimer.
L'occupation de la forteresse par les Russes, rend effective la protection que l'Amiral Andreeff est chargé d’assurer, et l'inconvénient d'exposer les familles musulmanes aux regards des soldats ne saurait contrebalancer ce sérieux avantage ; il est facile, d'ailleurs, à ces familles de se protéger par des simples rideaux contre les indiscrets.
Les Amiraux ont précédemment décidé de ne pas étendre la zone occupée et le moment n'est pas encore venu de rapporter cette décision.
À bord du « Sicilia », à La Sude, le 19 Juin 1897
Le Contre-Amiral anglais signé : R. Harris
Le Contre-Amiral russe signé : P. Andreeff
Le Contre-Amiral français signé : Ed. Pottier
Le Contre-Amiral austro-hongrois signé : Hinke
Le Vice-Amiral italien signé : N. Canevaro
N° 73
Séance du 28 Juin 1897
Les Amiraux ont reçu communication par l'intermédiaire du Gouverneur Général à La Canée, d’une réclamation du Gouverneur de Sitia.
Ce dernier se plaint de ce que le Commandant des troupes françaises, à Sitia, n'a pas voulu que les provisions achetées par les soldats supportassent l’impôt de la dîme.
Le fait est exact, mais il ne s'applique pas à ces provisions parce qu'elles proviennent des chrétiens, comme la réclamation le laisse entendre ; le refus de payer la dîme n'est pas basé sur la provenance des marchandises mais sur leur destination.
Les Amiraux ne sauraient admettre que leurs troupes soient obligées de payer un impôt au Gouvernement ottoman, et, pour ne laisser aucun doute dans l'esprit de l'administration ottomane, ils feront savoir au Gouverneur Général, par l'intermédiaire de l’Amiral français, plus particulièrement visé par la dernière réclamation, qu’ils ont pris la décision suivante :
Ne seront pas soumis au paiement de la dîme, les objets de consommation manifestement destinés aux troupes internationales, soit qu'ils proviennent de fournisseurs chrétiens ou musulmans, soit qu'ils proviennent d'importation ou qu’ils soient originaires de l’île.
Les Amiraux entendent par objets destinés aux troupes, ceux que ces troupes achètent directement aux producteurs et ceux aussi, que certains fournisseurs, ayant des traités avec les troupes internationales, se procurent pour faire face à leurs engagements (dans la limite des fournitures à faire).
Cette décision est applicable partout où sont les troupes internationales.
Les Amiraux ont été sollicités d'accorder leur protection aux Turcs qui ont manifesté le désir d'aller faire la récolte de leur blé aux environs de Chicalaria.
Par analogie avec une faveur analogue, accordée aux Chrétiens (procès-verbal N° 71 du 16 Juin), les Amiraux, désireux d'affirmer leur bienveillante neutralité, prient l'Amiral austro-hongrois de faire exercer cette protection par un détachement de ses soldats casernés à La Sude, à la condition que les moissonneurs se présentent sans armes et que le Colonel austro-hongrois ne trouve aucun inconvénient à assurer cette protection.
De même, le Major Bor a été autorisé à favoriser la moisson aux environs du blockhouse d’Izzedin, à la demande des insurgés, propriétaires des champs voisins.
À bord du « Sicilia », La Sude, le 28 Juin 1897
Le Contre-Amiral anglais signé : R. Harris
Le Contre-Amiral russe signé : P. Andreeff
Le Contre-Amiral français signé : Ed. Pottier
Le Contre-Amiral austro-hongrois signé : Hinke
Le Vice-Amiral italien signé : N. Canevaro